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La lumière
 
Notions de photométrie à l'usage du photographe technicien
 
 

Avec le sujet, l'appareil photographique et la surface sensible (ou le capteur numérique), la lumière fait partie des quatre principaux moyens de base nécessaire à la mise en œuvre du processus photographique. Son importance n'est pas sous-estimée puisqu'elle entre dans la composition du mot « photographie » (phôs, photos ayant en grec le sens de lumière) et souvent, on lui accorde les premières pages dans les ouvrages enseignant la photographie. Il faut dire aussi que, maintes fois, elle est hélas la source des déboires du photographe.

Bien que dans la pratique courante, le contrôle de la quantité de lumière entrant dans l'objectif soit automatique, certaines conditions de prise de vue peuvent amener l'opérateur à surpasser cette obéissance aveugle en débrayant temporairement l'automatisme de l'exposition. Aussi, l'acquisition, même succincte, de quelques éléments de photométrie lui permettra de mieux comprendre la détermination de la lumination, de la dominer et de prendre des initiatives positives face aux diverses situations se présentant à la prise de vue et au tirage.


Unités énergétiques ou unités lumineuses ?

Nous savons qu'une émulsion photographique est constituée de gélatine dans laquelle sont dispersés des cristaux d'halogénures d'argent (1). Du fait de sa photosensibilité, on assiste au moment de l'exposition à une décomposition de l'halogénure d'argent avec formation d'atomes d'argent métallique, ceux-ci constituant ce que l'on appelle les « germes » de l'image latente (2). Enfin, succédant à cette réaction photochimique, l'opération du développement – nous en connaissons le but – fait passer l'image latente invisible au stade d'image argentique visible.

La réaction chimique que nous venons de rappeler très brièvement n'est certes pas simple ; certains points du mécanisme de la formation de l'image latente sont encore à élucider. Mais, il faut bien réaliser toutefois que cette réaction ne peut être amorcée que grâce à un apport d'énergie venant de l'extérieur, à savoir l'énergie lumineuse. On admet que la lumière est formée de particules d'énergie ou photons ; la pénétration de ces derniers dans les cristaux d'halogénures d'argent correspond véritablement au point de départ du processus photographique.

Pour chacune des grandeurs énergétiques, on a défini une unité. Par exemple, le flux énergétique a pour unité le watt (W) et l'éclairement énergétique, le watt par mètre carré (W/m2). Or, chacun sait qu'il est d'usage en photographie de bouder le système des grandeurs et unités énergétiques et de qualifier la lumière de phénomène visuel. Acquiesçons donc à cette coutume conventionnelle et raisonnons, nous aussi, dans le système des grandeurs et unités lumineuses (ou visuelles) tout en conservant en mémoire le fait qu'il est moins adéquat que le système énergétique.


Principales grandeurs et unités lumineuses

Certaines grandeurs et unités anciennes, mentionnons la « brillance » (3) et la « bougie nouvelle » ne sont plus – heureusement – utilisées aujourd'hui. Par contre, notamment dans les livres anglo-saxons, nous pouvons encore rencontrer des unités actuellement déconseillées tels que le « footcandle » (unité d'éclairement) et le « footlambert » (unité de luminance) ! Aussi, en ce qui concerne l'énumération de ces principales grandeurs et unités photométriques, prenons pour référence la normalisation internationale (International Standard Organization ou ISO) dans ce domaine ainsi que les publications de la Commission Internationale de l'Eclairage (CIE).


Flux lumineux et intensité lumineuse

L'émission d'un rayonnement lumineux suppose nécessairement une source. Le soleil rayonne de façon uniforme dans toutes les directions et par rapport à la distance qui le sépare de l'observateur, son diamètre est relativement petit (diamètre de la source / distance = approximativement 1 / 100). Une telle source est dite « ponctuelle » bien que la source véritablement ponctuelle, c'est-à-dire constituée d'un seul point, n'existe pas.

Supposons au centre d'une sphère de un mètre de rayon, une source ponctuelle. Le débit de lumière (quantité totale de lumière émise par unité de temps dans toutes les directions) de cette source est appelé flux lumineux (F) et ce dernier a pour unité le lumen (lm).

A l'intérieur de notre sphère, ne considérons plus désormais le rayonnement de la source dans toutes les directions mais – dans une direction donnée – la fraction de flux émise à l'intérieur d'une unité d'angle solide (4). Le rapport flux lumineux / nombre de stéradians d'une sphère définit l'intensité lumineuse (I) de la source. L'intensité lumineuse a aussi son unité, la candela (cd) qui fait partie des 7 unités de base du Système International d'Unités.

La candela est l'intensité lumineuse, dans une direction donnée, d'une source qui émet un rayonnement monochromatique de fréquence 540 x 10 puissance 12 hertz et dont l'intensité énergétique dans cette direction est 1/683 watt par stéradian (définition du 12-10-1979). On retiendra surtout que le lumen est la fraction de flux lumineux émise par une source ponctuelle d'intensité uniforme (5) de une candela dans une unité d'angle solide (stéradian). A l'aide de ces premières notions de photométrie, calculons le flux lumineux total émis par une source ponctuelle d'intensité uniforme de 100 candelas (6) :

 
Intensité
x
Nombre de stéradians d'une sphère
=
Flux total
100 cd
x
4 π
=
1257 lm
 
 

Eclairement

Cette nouvelle grandeur nous amène à considérer l'autre extrémité de la « chaîne photométrique » c'est-à-dire le récepteur du rayonnement lumineux. Choisissons comme récepteur la surface de la sphère de l'exemple précédent. On appelle éclairement lumineux ou simplement éclairement (E), le flux lumineux reçu par unité de surface réceptrice. L'unité d'éclairement est le lux (lx) qui équivaut à un lumen par mètre carré.

En récapitulant, nous pouvons dire qu'une source ponctuelle d'intensité uniforme de une candela, placée au centre d'une sphère de un mètre de rayon, émet par stéradian, une fraction de flux lumineux de un lumen conduisant à un éclairement de un lux au niveau de la surface de cette sphère.

Après avoir calculé le flux total émis par une source de 100 candelas, déterminons maintenant (tableau 1), avec cette même source, l'éclairement à la surface de la sphère de 1 mètre de rayon, puis d'une autre sphère de 2 mètres de rayon.

 
Rayon de
la sphère
Surface de
la sphère
Intensité
Flux total
Eclairement
1 m
12,57 m2
100 cd
1257 lm
100 lx
2 m
50,26 m2
100 cd
1257 lm
25 lx
 
Tableau 1 : Calcul de l'éclairement
 

Nous venons ainsi de vérifier une règle capitale de la photométrie dont la connaissance est fort utile en photographie : l'éclairement est proportionnel à l'intensité de la source (7) et inversement proportionnel au carré de la distance source - récepteur.

Signalons pour être précis que l'éclairement est aussi proportionnel au cosinus de l'angle d'incidence des rayons lumineux sur le récepteur. L'appareil servant à mesurer l'éclairement s'appelle luxmètre. En studio, le photographe utilise régulièrement cet instrument pour contrôler le contraste d'éclairement. C'est aussi un outil indispensable pour les travaux de reproduction où l'uniformité de l'éclairement doit être rigoureuse ; il n'en est pas autrement d'ailleurs sur le plateau de l'agrandisseur.

 
Par exemple, le MAVOLUX 5032 C USB (Gossen) est conçu pour les photographes soucieux d'améliorer la qualité de leur travail. Outil polyvalent, il permet de mesurer les éclairements aussi bien que les luminances. En mode luxmètre, les résultats de la mesure peuvent être exprimés en lux ou footcandle tandis qu'en mode luminancemètre, l'opérateur à le choix entre candela/m2 ou footlambert !
 
 

Luminance

Deux sources non ponctuelles – la notion de luminance ne pouvant s'appliquer à une source véritablement ponctuelle – n'ont pas forcément la même surface émettrice. Prenons comme exemple deux sources de forme sphérique (globes en verre translucide) de même intensité (intensité uniforme de 200 cd) mais de rayon différent : 2 cm et 10 cm.

A l'observation, ces deux sources présentent bien sûr une surface apparente différente et surtout, nous remarquons que la petite est plus brillante que la grosse. Pourtant, elles ont une intensité lumineuse identique et produisent par conséquent le même éclairement au niveau d'un récepteur. Seul, l'aspect diffère aux yeux de l'observateur. Le rapport intensité lumineuse / surface apparente permet d'apprécier objectivement l'aspect d'une source ; c'est ainsi que l'on définit la luminance qui, en quelque sorte, est une « intensité apparente ». L'unité de luminance est la candela par mètre carré (cd/m2) appelée aussi autrefois nit.

Calculons la luminance de nos deux sources tout en différenciant surface émettrice et surface apparente (tableau 2). Pour une sphère, la surface apparaissant à l'observateur équivaut à celle d'un cercle dont le rayon est celui de la sphère. Nous remarquons que les valeurs de luminance expriment bien l'aspect respectif des deux sources.

 
Intensité
de la source
Rayon de
la source
Surface émettrice
Surface apparente
Luminance
200 cd
0,02 m
0,0050 m2
0,0013 m2
153 846 cd/m2
200 cd
0,10 m
0,1257 m2
0,0314 m2
6 369 cd/m2
 
Tableau 2 : Calcul de la luminance
 

En photographie, le rayonnement lumineux généralement ne se propage pas uniquement en ligne droite de la source (soleil, lampe...) au récepteur (film ou cellules photoélectriques). Le flux lumineux émis par la source « primaire » est réfléchi – partiellement – par les multiples surfaces offertes par le sujet et son décor pour atteindre finalement la couche sensible (ou le capteur) au fond de la chambre noire, tel est le trajet classique bien connu. Ces surfaces intermédiaires renvoyant dans toutes les directions une partie du flux incident agissent comme de véritables sources (8) dites secondaires. Source à surface émettrice étendue, elles se caractérisent, elles aussi, par leur luminance.

A la prise de vue, lors de la détermination de la lumination, c'est la luminance du sujet – élément de base essentiel – qui est évaluée de façon précise. Pour cela, l'opérateur fait appel à un instrument de mesure qui est tout simplement le posemètre appelé communément cellule. A partir de la luminance du sujet mais aussi en fonction d'autres paramètres, le posemètre, grâce à son calculateur incorporé, donne directement la combinaison ouverture de diaphragme / temps d'exposition. Notons que certains posemètres appelés spotmètres peuvent faire – à distance, sur un angle très réduit – une mesure sélective précise de n'importe quelle zone de la composition photographique et que quelques-uns d'entre eux sont capables d'exprimer les résultats de la mesure en cd/m2 comme de véritables luminancemètres.


Lumination

Appelée jadis quantité d'éclairement, la lumination ou exposition lumineuse (H) est égal au produit de l'éclairement par le temps et se mesure en lux-seconde (lx.s). A la prise de vue comme au tirage, la recherche de l'exposition exacte constitue une des premières préoccupations du photographe.

 
 
Grandeur
Symbole
Unité
Symbole
Intensité lumineuse
I
Candela
cd
Flux lumineux
F
Lumen
lm
Eclairement
E
Lux
lx
Luminance
L
Candela par m2
cd/m2
Lumination
H
Lux.seconde
lx.s
 
Tableau récapitulatif des principales grandeurs et unités visuelles
 
 
 
__________
1. Logiquement donc, on devrait parler de « suspension photographique » !
2. Pour en savoir davantage sur la formation de l'image latente, se reporter au livre de Pierre Glafkidès, Chimie et physique photographiques, 4e éd., Paris : Publications Photo-Cinéma Paul Montel, 1976, p. 33.
3. Depuis 1961, la brillance est remplacée par la luminance.
4. Nous lisons dans le dictionnaire Larousse que l'unité de mesure d'angle solide (nommée stéradian) « équivaut à l'angle solide qui, ayant son sommet au centre d'une sphère, découpe, sur la surface de cette sphère, une aire équivalente à celle d'un carré dont le côté est égal au rayon de la sphère ». Au cas présent, l'aire découpée correspond donc à un mètre carré.
5. S'il est plus facile de raisonner avec une source d'intensité uniforme, il faut bien noter cependant que les sources réelles ne rayonnent pas de façon uniforme dans toutes les directions. Généralement donc, l'intensité varie avec la direction d'observation.
6. Cette intensité peut être celle d'une lampe à incandescence de 90 watts.
7. Cette première affirmation n'est pas directement démontrée dans le tableau mais nous la vérifions mentalement. Notons que se vérifie aussi dans la pratique de l'éclairage, la règle d'additivité des éclairements.
8. Dans ce raisonnement relatif à la propagation de la lumière, précisons que l'on peut utiliser les diverses surfaces du sujet comme récepteurs si l'on considère le flux incident ou comme sources si l'on s'intéresse au flux réfléchi.
 
 
Copyright © Claude Bouchot